Travailler en marchant. Absurde ?
Travailler en marchant.
Absurde ?
Marcher… Quoi de plus naturel
Cette mise en mouvement
est le premier acte de liberté et d’indépendance chez l’enfant. Et quelle joie
partagée lors des premiers pas !!
Fonction naturelle et
spontanée qui permet à l’Homme de vivre en toute autonomie.
Et c’est seulement quant
on en est privé que l’on prend conscience de toute l’importance qu’elle revêt.
Alors finalement,
pourquoi écrire sur ce que l’on fait au quotidien sans même y penser ?
Nous avons tendance à
l’oublier, mais marcher fût indispensable au travail. Peuple nomade par essence,
l’Homme marchait pour subvenir à ses besoins, pour aller chercher son travail.
Avec la révolution
industrielle nous avons commencé à nous sédentariser et le XXIème siècle, avec
ses moyens de transport ultra développés et ses outils de connectivité, voit
l’homme se sédentariser.
Il est d’ailleurs assez
ironique de constater que les outils qui nous conduisent à nous sédentariser
soient qualifiés d’outils d’itinérance. A l’heure où le télétravail fait des
émules, nous nous déplaçons de moins en moins pour aller travailler.
Nos pieds ne sont donc aujourd’hui
que très accessoires dans nos déplacements et la marche ne semble plus
essentielle à notre travail.
A tel point que notre
indépendance, qui se matérialisait par cette grande victoire et cette immense
joie dès lors que chacun d’entre nous a mis un pied devant l’autre en titubant,
nous l’avons transformée en dépendance à une appli pour nous rappeler que nous
devons marcher. 10 000 pas par jour donc…
Et si on réintroduisait la marche dans notre travail ?
Non plus comme une
fonction de déplacement pour nous y rendre, nous avons d’autres moyens pour ça,
mais comme un moyen de travailler autrement ? Travailler autrement et
envisager cette fonction vitale comme un outil de travail.
Incongru ? Pas tant
que ça.
Totalement allergique à
la perte de temps, accro à l’extérieur et convaincue que l’on travaille avec
efficacité et motivation dès lors que l’on a trouvé ses sources de satisfaction,
je m’interroge sur les nouveaux modes de travail.
Pourquoi travailler
autrement ?
Quelle pertinence ?
Pourquoi envisager de
travailler en marchant ?
Travailler en marchant, c’est sortir du cadre du bureau pour travailler dans un
environnement moins formel. On casse les codes, les repères habituels. Là où
chacun reste à sa place, dans son rôle, dans un bureau, partir marcher ensemble
invite à plus de simplicité dans la relation. Je pourrais citer l’exemple d’une
personne que j’ai accompagnée dans la construction de son projet professionnel.
Lors de chacun de nos rendez-vous, nous nous saluions de façon formelle en nous
serrant la main mais, spontanément, nous nous sommes fait la bise lorsque nous
avons démarré notre séance « en marchant ».
Cheminer côte à côte permet de créer plus facilement la
relation,
de mettre en place un terrain neutre, de se trouver sur un pied d’égalité,
d’adulte à adulte. Sans séparation, les barrières ont tendance à tomber, le
paraître à disparaître. Ce changement dans la relation et dans la posture ouvre
la porte à une communication davantage empreinte de spontanéité, de franchise,
de « vrai » et entraîne une liberté de parole. La richesse des
échanges qui en découle est à elle seule déjà une matière utile au travail.
Se mettre en mouvement pour réfléchir, remettre l’esprit au
rythme de la lenteur pour lui permettre, lui aussi, de cheminer. Le Commissaire
Adamsberg des romans de Fred Vargas déambule pour comprendre, mettre en lien,
ordonner ses pensées, saisir ce que son esprit a senti pour arriver à le
conscientiser. Faire parler les évidences… et résoudre l’énigme.
L’alternance des moments
d’échange et des moments de silence nourrit le processus de réflexion, qui
s’opère tout au long de la marche. Les choses se disent et l’on peut dérouler
le fil de nos pensées à notre rythme.
Le silence est un invité
essentiel et joue un rôle central car la réflexion poursuit son chemin. Là où,
autour d’une table ou d’un bureau, il peut être ressenti comme très gênant, il
permet en fait de rebondir, de construire sa pensée, de mettre en place tous
les éléments nécessaires à la compréhension.
En complément de
l’intérêt que la marche revêt pour la réflexion, l’acte physique qu’entraîne la
marche produit des conditions, qui rendent le travail efficient en agissant sur
le corps. Marcher est une activité physique douce, que tout le monde peut
pratiquer, que l’on peut faire partout. Elle produit des hormones, source de
plaisir, neurotransmetteur du bonheur, qui nourrissent la réflexion et la
mémoire de travail. On se sent moins fatigué et plus productif.
Marcher permet donc d’entrer
dans une double dynamique mental et corps pour plus de créativité, de réflexion.
Cela devient un formidable outil d’aide à la décision, que l’on peut mettre au
service du travail… ou non. Et
oui ! Dans les comédies romantiques, nombre de héros partent marcher avant
de prendre leur décision de demander leur douce en mariage.
Le mouvement opéré par
ce moyen de travailler permet de mettre en place une dynamique positive,
d’ancrer le changement dans le corps.
Travailler en marchant
est une perspective à tester, sans aller jusqu’à devenir stakhanoviste et transporter
votre bureau dehors.
N’hésitez pas à envisager de réaliser certaines de vos tâches
en marchant. Vous serez surpris de constater à quel point de nombreux sujets se
prêtent terriblement bien à l’exercice : entretien de recrutement, point
avec un collaborateur, brainstorming,…
Violaine Bô
Le 18 juin 2018